Peut-il exister une démocratie sans conflits ? Doit-on conjurer et sublimer les affrontements plutôt que les laisser éclore ? Enfin, l’Union européenne est-elle une démocratie consensuelle, privilégiant le compromis plutôt que le conflit ? Dans le cadre de la démocratie représentative qui s’est affirmée depuis les révolutions de la fin du XVIIIe siècle, la démocratie s’est structurée de manière essentielle par le conflit : conflit entre partis et programmes qui attestent de visions différentes des priorités politiques et des orientations stratégiques, conflits de principes (égalité ou liberté, solidarité ou responsabilité, etc.) ; conflits sociaux menés au niveau syndical et associatif au sein de la société civile, qui témoignent de luttes d’intérêts puissantes. La démocratie est le régime qui, contrairement à la tyrannie, ne fait pas taire le dissensus mais encourage le pluralisme au prix du conflit. Dans une démocratie, le pouvoir du demos n’est jamais unitaire ou monolithique. Cette contribution s'attache à montrer que, malgré les apparences, l'Union européenne, en réalité, n'y échappe pas.