La notion d’environnement nocturne (Challéat, 2018) constitue un front de recherche. Elle permet d’élargir la question de la pollution lumineuse, en mettant en regard les besoins de lumière artificielle et les besoins d’obscurité nécessaires au fonctionnement du vivant et à l’hygiène sanitaire des populations humaines. Sa construction en objet de recherche relationnel et matrice informationnelle le positionne à l’interface entre sciences humaines et sociales, sciences du vivant, sciences de l’univers et sciences pour l’ingénieur. Ce faisant, on se démarque des seuls enjeux d’exceptionnalité construits autour du ciel étoilé ou d’espèces emblématiques, pour élargir notre considération aux composantes et processus ordinaires de l’environnement. Méthodologiquement cette approche plaide pour raisonner à l’échelle de la proximité afin d’appréhender finement les processus en jeu et leurs interactions. Suivant cette approche, la notion de socio-écosystème nocturne (SEN) propose un raisonnement épistémologique qui s’inscrit dans le cadre d’analyse holistique des systèmes socio-écologiques (Ostrom, 2009 ; Binder et al., 2013). Afin d’outiller ce cadre méthodologique, nous avons fait l’hypothèse que le paysage sonore constitue un objet-passerelle pertinent. Focalisés en effet sur le couple lumière artificielle/obscurité naturelle, les travaux menés sur les paysages nocturnes ont jusqu’ici peu intégré leur composante sonore. Dans notre démarche, le paysage sonore se révèle à la fois comme prétexte et comme objet du travail interdisciplinaire : il permet de réactualiser les rapports Hommes-milieux en contexte d’anthropocène. Dans cette démarche interdisciplinaire nous avons mis à profit la complémentarité des compétences et des expertises de la géographie de l’environnement, de l’écologie et de l’intelligence artificielle. Le protocole développé a par ailleurs permis une confrontation fructueuse et créatrice des savoirs scientifiques et des pratiques habitantes.